L’école inclusive, un pléonasme !

L’Enseignement catholique d’Alsace a accueilli Charles Gardou pour un travail sur l’école inclusive. Cette réflexion a rassemblé des chefs d’établissement, professeurs, éducateurs et autres personnels des 32 établissements catholiques d’Alsace le mercredi 15 janvier 2020 à l’Institution Notre-Dame à Strasbourg.

                                                                                                                                                                                                           Jean Thomas

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Patrick Wolff, directeur diocésain de l’Enseignement catholique d’Alsace, a ouvert cette journée en affirmant : « Il y a dans l’Enseignement catholique une volonté de dire que l’École catholique est une école pour tous.  Dès 2015 dans notre projet diocésain nous parlons d’ASH, et l’école inclusive… Dans le même esprit, le Campus 2019 (un séminaire collaboratif de l’Enseignement catholique ayant eu lieu le 29 mars 2019 aux Mureaux) a inscrit dans les objectifs de l’institution, la volonté de vivre une école de l’hospitalité. Il s’agit donc de reconnaître que toute personne est un don du ciel et pas un problème de plus à gérer »

« Permettre que l’école soit accessible à tous est un enjeu de taille, un défi. Mais ce qui est au bénéfice de l’un, doit être au bénéfice de tous », précise Frédérique Rauscher, Inspectrice de l’Éducation Nationale ASH (Adaptation scolaire et Scolarisation des élèves en situation de Handicap) et de continuer :« C’est à travers vos missions que vous allez permettre à vos élèves d’être engagés dans une société sans discrimination, une société de l’équité. » Grandir dans une école inclusive permettra plus largement de vivre dans une société plus inclusive.

Après ces réflexions, Myriam Dursus, adjointe du Directeur Diocésain et responsable de l’équipe école inclusive présente ensuite Charles Gardou. Professeur d’anthropologie à l'Université Lumière Lyon 2 et spécialiste du handicap, il consacre ses travaux à la diversité humaine et à sa vulnérabilité, dans leurs multiples expressions.

Après l’anthropologie culturelle, il s’est intéressé à l’anthropologie des situations de handicap : « Là aussi il y a une forme d’altérité et cette altérité nous interroge sur ce qu’on considère comme normal, comme ordinaire, sur nos habitudes, nos conceptions de la vie. »

Quand Charles Gardou parle de société inclusive, ou d’école inclusive, il adopte le point de vue des personnes en situation de handicap et soulève un problème sociétal : « L’école est bâtie sur une inquiétude fondamentale. Elle doit être disponible à tous et accessible à tous. L’école est le patrimoine de tous. Elle n’est pas un bien privatif. Elle n’est pas le privilège exclusif des enfants préservés de handicap. »

Aujourd’hui, il y a encore des mises à l’écart qui sont des formes de maltraitance. Or, 15% de la population mondiale est aujourd’hui en situation de handicap, soit une personne sur sept concernée. Et quelque 263 millions d’enfants les plus vulnérables ne sont pas scolarisés. « C’est un des crimes sociaux de notre temps. Rien ne justifie la double peine : fragiles et exclus en même temps ! … Tout le monde n’arrivera pas aux études les plus élevées, mais chacun a le droit de grandir à sa manière. Il faut permettre aux enfants qui sont loin de la norme de grandir. L’éducation prépare à la communauté humaine. Sans l’éducation, l’enfant risque de rester à l’écart. Les enfants qui grandissent dans une école aseptisée ne pourront pas construire une société ouverte à tous. »

Charles Gardou voudrait agir sur des comportements et ouvrir à la vraie diversité. Pour lui, l’expression « société inclusive » est un pléonasme. La définition du mot société amenant à la notion de communauté, d’association, d’alliance. L’adjectif « inclusif » associé à société est un élément renforçateur : « Nous sommes un tissu de fragilités et nous ne savons pas composer avec. Nous sommes divers avec nos vulnérabilités… On ne parle jamais assez d’une chose que quand nous la perdons. Nous avons du mal à faire société et nous voilà à parler de société inclusive. Nous sommes dans une contre-culture. »

Pour lui, notre temps a besoin de cet horizon, alors que des tensions contraires s’affrontent :

« On parle d’accompagnement humain dans tous les domaine (fin de vie, le handicap). En même temps, les plus vulnérables vivent avec un sentiment de désaffiliation et d’insécurité dans une société qui se veut de plus en plus sécurisée. On est de plus en plus assujetti à des normes souveraines. Les exigences ne cessent de croître. Pourtant l’humanité, c’est une infinité de singularités, d’inflexions, de crises, d’aspérités.»

La visée inclusive, c’est d’ouvrir les établissements à tous les enfants.  En France, la loi du 11 février 2005 défend l’égalité des droits, notamment en matière d’éducation pour tous les enfants. En 2007 puis 2009, le pays a aussi ratifié la convention internationale des droits des personnes handicapées. La France s’engage ainsi dans le mouvement inclusif à tous les niveaux.

Comment agir au niveau de l’école ? En atelier, quelques pistes ont été travaillées : Sortir d’une vision égalitaire pour privilégier l’équité, accentuer la formation de tous les acteurs permettent par exemple d’avancer.

 

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