Le numérique éducatif en temps de crise

Un Webinaire sur l’usage des outils numériques dans l’enseignement catholique s’est tenu le 1er avril dernier. Parmi les intervenants : des responsables du réseau Optic et du Sgec, ainsi que des acteurs de terrain venus témoigner de leurs pratiques depuis le début de la crise sanitaire.

François Husson

« C’est un moment nouveau et étrange », a déclaré le père Renaud Laby, en ouverture du webinaire organisé par le Secrétariat général de l’enseignement catholique (Sgec) et le réseau Optic (Ordre des prêcheurs pour la technologie l’innovation et la communication), le 1er avril dernier, en remplacement de la rencontre nationale prévue ce même jour à Montrouge (92). « Il nous faudra être attentif à la manière de transformer ce qu’on vit actuellement en quelque chose de construit », a ajouté le directeur du pôle formation d’Optic. Animé par Jérôme Brunet, responsable du département Éducation du Sgec, le webinaire « Comprendre la société numérique » était centré sur les usages des outils numériques dans l’enseignement catholique.

 

Parmi les intervenants, Philippe de Labarthe, expert en technologie éducative, a pointé les déplacements opérés par la crise : la réorganisation des familles et le problème de leur équipement, la disparité des outils utilisés par des enseignants contraints de créer des contenus, le monopole des grandes plateformes face aux start-ups qui peinent à capter un public. « Le numérique éducatif, ce n’est pas seulement la technologie, c’est aussi l’usage qu’en font les enseignants qui recherchent d’abord l’efficience technique avant la créativité pédagogique. Ils devront dire leurs besoins pour l’après », a estimé l’expert.

 

Quatre témoignages de terrain

 

Quatre témoignages de terrain ont suivi. François Jourdain, chef d’établissement du Christ-Roi, à Tours, a dressé un bilan de ce qui se vit dans son école : « Chaque élève a un ordinateur portable et un compte créé sur la G Suite. Nous échangeons en visio, en chat, dans une classroom où les devoirs sont échangés entre enseignants et élèves. Les plus jeunes ont été brusqués, les parents n’étaient pas tous à l’aise. Nous avons manqué de temps, mais cela va nous servir pour notre projet informatique. » Jean-Marie Quiniou, directeur d’un collège rural des Côtes-d’Armor, a reconnu pour sa part utiliser surtout Pronote, et sa fonction cahier de textes. « C’est un outil connu. On a mis un disque dur en réseau pour déposer et prendre les ressources, et on converse via l’ENT Moodle, déjà mis en place depuis quatre ans. Tout fonctionne bien, si ce n’est que les enseignants surchargent les élèves. » Autre écho avec Catherine Guinoiseau, responsable du service numérique à la direction diocésaine d’Angers : « Ceux qui s’en sortent le mieux communiquent simplement. Le mail n’est pas suffisant, et c’est une surcharge de gestion. Pour éviter les pratiques désordonnées de certains enseignants, mieux vaut utiliser un ou deux outils harmonisés, et se méfier des réseaux sociaux, qui ne protègent pas les données personnelles ». Enfin, Emmanuel Vandroux, directeur diocésain à Versailles, s’est réjoui de la mise en place d’« une vraie continuité éducative et pastorale, même sans relation réelle ». « Il faudra cependant inventer de nouveaux outils pour tous, afin d’éviter les écarts. Le retour d’expérience ne devra pas se limiter à la technologie, mais aux différences de niveaux et aux notions apprises », a-t-il ajouté.

 

En conclusion, le père Renaud Laby a insisté sur la dimension occultée des outils numériques : le rapport au corps, et une communication non verbale qui doit se soucier d’être bien perçue. « Le numérique ne remplacera pas le lien direct », a-t-il insisté. « On a expérimenté cette nécessité mais que gardera-t-on ? », s’est demandé Philippe de Labarthe qui a alerté sur la nécessité de se former pour faire les bons choix, un thème au centre d’une prochaine rencontre avec le réseau Optic, prévue à l’automne 2020.

 

 

 

 

Optic: Pour un humanisme numérique

Le réseau Optic (Ordre des prêcheurs pour la technologie l’innovation et la communication), fondé par le père dominicain Éric Salobir en 2012 (cf. son portrait dans ECA 395, p. 38-39), invite tous les acteurs du numérique à respecter la place de l’Homme. Il intervient auprès du Conseil pontifical, dans la Silicon Valley et aide l’enseignement catholique à penser son rapport avec les nouvelles technologies.

 

 

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