Mis à jour le : 22 avril 2021 / Publié le : 4 octobre 2016
Une conférence de presse de rentrée qui invite à un climat pacifié et pacifiant
Éduquer à l’altérité et à la rencontre … C’est l’horizon pointé par Pascal Balmand, le secrétaire général de l’enseignement catholique, lors de sa conférence de presse de rentrée, qui s’est tenu au Sgec, le 4 octobre 2016. Parmi les dossiers évoqués : politique volontariste en matière de mixité sociale et scolaire, priorité donnée au dialogue interculturel et interreligieux, École plus inclusive… et augmentation des effectifs qui traduit une confiance des parents pour une École « au climat éducatif pacifié et pacifiant »
Des effectifs en progression continue
En cette rentrée 2016, les établissements catholiques ont accueilli 2 085 630 enfants et jeunes, soit 17 076 élèves de plus qu’en septembre 2015 (+ 0,8 %). Ininterrompue depuis 2009, l’augmentation des effectifs de l’enseignement catholique atteint ainsi un total de plus de 80 000 élèves en huit ans.
La progression des effectifs relevant de l’Éducation nationale concerne le 1er comme le 2 nd degré et se vérifie dans la quasi totalité des académies, à l’exception de Caen, de Nancy-Metz en métropole tandis que les évolutions constatées dans les DOM sont encore à confirmer. Les établissements agricoles ont, pour leur part, perdu quelque 500 élèves (-1,2 %).
« Aucun effet réforme du collège à invoquer, puisque celle-ci s’applique dans le privé comme dans le public » a précisé Pascal Balmand, qui a aussi pointé que le 2nd degré progressait davantage que le 1er degré pour des raisons démographiques. En attendant les chiffres consolidés, courant novembre, le secrétaire général a juste fait état de variations locales conséquentes qui empêchent toute analyse globalisante de cette hausse des effectifs. Pour lui, elles « expriment surtout la confiance que de très nombreux parents vouent à nos établissements. Une confiance qui se fonde sur la qualité du travail entrepris par les chefs d’établissement et leurs équipes (…) qui se nourrit du climat éducatif pacifié et pacifiant qui caractérise les établissements de l’enseignement catholique. Une confiance qui nous oblige, accroît notre responsabilité et renforce notre mobilisation. »
Dans certaines régions, toutes les demandes d’inscription ne peuvent être honorées faute de place et faute de moyens pour ouvrir de nouveaux établissements. Face à ce constat, Pascal Balmand prône « une ligne politique de souplesse concertée » et souhaite notamment que les établissements qui s’inscrivent dans les politiques publiques en faveur de la mixité bénéficient de moyens supplémentaires. Sans toutefois entrer dans la politique d’éducation prioritaire, le Sgec va s’employer à identifier une liste d’établissements qui y seraient éligibles, au nom des publics scolaires accueillis, afin de la présenter au ministère de l’Éducation nationale.
Mixité sociale et scolaire, un enjeu pédagogique
En matière de mixité, « enjeu éducatif majeur », l’École catholique n’entend « ni fuir ses responsabilités, ni endosser le rôle de bouc émissaire » a déclaré Pascal Balmand, rappelant que, depuis 2008, 983 postes ont été redistribués en interne à des projets en faveur des élèves en situation de fragilité sociale et scolaire. Et l’approfondissement de l’ouverture à tous s’intensifie avec 210 postes (181 postes et 29 postes au titre des suivis pédagogiques d’initiatives antérieurement lancées) dédiés en cette rentrée 2016 et 300 prévus pour septembre 2017. Par ailleurs, le Sgec a recruté l’universitaire Sylvie Da Costa, spécialiste des sciences de l’Éducation, pour analyser la situation en matière de mixité sociale et scolaire, identifier des critères de réussite d’une mixité efficiente et à accompagner les équipes sur ce champ.
Répondant aux journalistes l’interrogeant sur les nombreuses études récemment parues sur la mixité, Pascal Balmand en a profité pour pointer la divergence de leurs constats, notamment concernant le rôle de l’enseignement privé dans la ségrégation scolaire. Une preuve du manque de pertinence d’une approche exclusivement statistique et globalisante là où il convient, selon lui, de développer des analyses plus fines prenant en compte la diversité des territoires, la composition des classes et des critères mesurant la réussite des élèves.
Concernant la mise en cause de l’enseignement catholique parisien taxé d’élitisme, Pascal Balmand a fait valoir le profil sociologiquement atypique d’une capitale très gentrifiée. Interrogé sur l’aggravation de la ségrégation dans l’enseignement privé relevée par la publication de la Depp (direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance), Pascal Balmand a fourni trois éléments de réponse : la question financière, l’implantation historique de l’enseignement catholique dans les centres villes des agglomérations (qui sont moins diversifiés dans leur population) et la difficulté, en termes de moyens, notamment à se développer dans des zones moins favorisées. Il a enfin fait valoir que le travail de longue haleine engagé pour développer la mixité sociale et scolaire dans les établissements pouvait être masqué par l’essor, plus rapide, des stratégies d’évitement de certaines familles.
Comment l’école amplifie-t-elle les inégalités ?
Le rapport publié le 27 septembre 2016 par le Cnesco
Massification scolaire et mixité sociale
La revue Éducation et Formations de la Depp n°91
Dix ans de mixité sociale au collège
Le rapport de Pierre Coutiaux de l’Edhec
La réforme du collège en marche
Partout les équipes se sont mises au travail. Elles s’efforcent d’appliquer cette réforme qui sur bien des points correspond à la culture de l’enseignement catholique. D’une part parce qu’elle développe l’accompagnement personnalisé (AP) de chaque élève. D’autre part, parce qu’elle introduit les EPI (enseignements pratiques interdisciplinaires) et que le dialogue entre les disciplines permet de donner du sens aux savoirs. Enfin, parce que la réforme encourage l’autonomie des équipes et des chefs d’établissement. Une autonomie qui, ici ou là, semble mal comprise par certaines administrations rectorales qui veulent continuer à tout contrôler et demandent aux chefs d’établissement de leur fournir, par exemple, la répartition des heures entre les cours, les AP et les EPI ou encore la liste des EPI. La réforme suscite aussi des réserves, en particulier sur la suppression des classes bilangues. Toutefois, les recteurs font preuve de souplesse dans le cadre des bilangues de continuité (qui permettent à un élève qui aurait commencé, par exemple, l’allemand au primaire de le continuer en 6e). Le sort des langues anciennes a pu paraître aussi menacé. En réalité, « tout est fonction des choix des établissements : en combinant EPI et enseignement des langues anciennes, il leur est possible de maintenir, à un quart d’heure près, ce qui existait avant la réforme », a précisé Pascal Balmand. Alors que de son côté, l’Apel national va mettre en place un comité de suivi de la réforme, le Sgec en fera aussi un bilan avec les directeurs diocésains de l’enseignement catholique.
Les questions de bioéthique sur la sellette
Un document édité par la Fondation Lejeune a été mis à la disposition des élèves d’un établissement privé de l’académie de Montpellier. Intitulé Manuel de bioéthique des jeunes, bien qu’il ne s’agisse en rien d’un manuel scolaire, son contenu a suscité la polémique. Pascal Balmand a rappelé qu’il est légitime dans le cadre de la vie scolaire qu’une parole chrétienne soit proposée dans un établissement catholique. Il a toutefois souligné qu’il incombe aux éducateurs de faire preuve de tact, pédagogie et ouverture sur ces sujets délicats. « Or, a-t-il précisé, des questions peuvent se poser sur certains passages de ce document. Dans quelle mesure se place-t-il d'abord dans la recherche du dialogue, et dans celle de l'équilibre entre d'une part les principes à rappeler et d'autre part la priorité à toujours donner à l'empathie, à l'accueil des personnes et à la délicatesse que requièrent ces questions graves et complexes ? »
L’altérité et la rencontre, comme horizon éducatif
Face au déficit de raison et d’espérance de notre société, Pascal Balmand a appelé au calme et à la paix, évoquant notamment la poursuite de la dynamique « Réenchanter l’École », comme levier pour retrouver une vision partagée. Dans le même esprit, il a rappelé que le texte d’orientation sur l’éducation au dialogue interculturel et interreligieux dans nos établissements, voté par le Comité national de l’enseignement catholique, en juillet dernier allait s’enrichir d’une série de fiches destinées à nourrir la réflexion et à éclairer la pratique des équipes : « Elles illustreront la manière dont l’École catholique vaut par essence comme une École de l’accueil de tous et du respect de chacun. En cela, elles diront aussi quelque chose de notre conception de la laïcité : une laïcité de liberté et de dialogue, et non une laïcité d’exclusion. »
Entre autres leviers pour réenchanter le « nous » (thème des prochaines journées des communautés éducatives qui se tiendront le 1er décembre dans toute la France), il a aussi évoqué la belle expérience humaine de Solida’Rio, où une délégation de lycéens de l’enseignement catholique, valides ou en situation de handicap a vécu l’aventure des Jeux paralympiques. Les témoignage transmédia de ces jeunes – vidéo, livre, photographies - présenté le 10 novembre prochain, au Conseil économique, social et environnemental, à Paris. Cette journée intitulée "De la différence à la reconnaissance" dressera le bilan de plus de dix ans d’inclusion scolaire. Les réalisations des jeunes ambassadeurs de Rio viendront appuyer le travail de sensibilisation à l’accueil de la différence mené dans les établissements.