Les Régions ne veulent pas être les sous-traitants des réformes

À l’occasion de la présentation de leur manifeste pour le lycée d’aujourd’hui et de demain, le 28 août 2018, les Régions ont rappelé combien les chantiers éducatifs lancés allaient les impacter et supposaient donc, pour réussir, un partenariat fort avec le ministère de l’Éducation.

Aurélie Sobocinski

L’opposition reste frontale avec le gouvernement, et la blessure à vif du côté des Régions sur la réforme de l’apprentissage. Le ton adopté par l’Association des Régions de France, lors de la conférence de presse de rentrée sur le thème de l’Education le 29 août à Paris, s’est pourtant voulu constructif, au regard des échéances qui s’annoncent.
« La rentrée 2018 est une rentrée extraordinaire pour notre responsabilité. Nous voulons que cela se passe dans de bonnes conditions et ne faisons pas de procès d’intention à Jean-Michel Blanquer. Nous demandons au ministre de l’Éducation nationale de faire toute la place nécessaire aux Régions dans l’écriture des grandes réformes à venir, dont la réussite suppose un partenariat fort », a insisté en préambule François Bonneau, son président délégué, qui a profité de l’occasion pour présenter avec Kamal Chibli, président de la commission Éducation, un « manifeste des régions pour le lycée d’aujourd’hui et de demain » .
Reprenant la liste des chantiers à venir -réforme du lycée, de la voie professionnelle et de l’orientation- les sujets de tension voire de conflits potentiels n’ont toutefois pas manqué d’affleurer.

Le coût impossible des manuels

S’agissant du nouveau lycée voulu par la Rue de Grenelle et des évolutions fortes annoncées sur les manuels, les Régions, qui restent les financeurs principaux de ces derniers, plaident pour une association directe à la réflexion avec le ministère et les éditeurs. « La transformation numérique est en cours. Il faut réfléchir à une nouvelle articulation des supports numériques et papiers, mutualiser les exemples vertueux déjà expérimentés dans certains territoires comme la région Grand-Est pour ne pas augmenter la charge des Régions et maintenir la gratuité aux familles. Et il y a urgence : la rentrée 2019 c’est demain », a souligné Kamal Chibli. Le remplacement des manuels en support papier « classique » a été chiffré par l’ARF à un coût « totalement impossible» pour les Régions de 260 à 320 M sur deux ans, et incompatible avec les objectifs budgétaires qui leur sont imposés.

Quant à l’orientation scolaire, qui a finalement été attribuée aux Régions juste avant l’été dans le cadre de la nouvelle loi sur la formation professionnelle, celles-ci demandent des précisions. « Le ministre a annoncé l’évolution ou la disparition des CIO (centres d’information et d’orientation, ndlr). Mais quel périmètre exact va être transféré à nos collectivités ? On est prêt à relever le défi à condition que les moyens nous soient donnés pour le faire. Il faut que nous puissions nous mettre d’accord avec le ministère sur un cadre national précis d’articulation entre la vie des établissements scolaire et le travail que nous allons faire, en associant étroitement aussi les acteurs économiques. C’est à un changement de logiciel commun que nous sommes appelés, à l’élaboration d’une chaîne de responsabilité partagée qui ne doit pas opposer Régions et État », soutient François Bonneau qui rappelle que le sujet sera abordé lors du prochain congrès de l’ARF à Marseille le 27 septembre.

Le regard de l'enseignement catholique

« Les Régions manifestent leur volonté de garder la main sur une partie de la carte des formations en apprentissage. L’expérience a montré par le passé des déclinaisons très différentes de ce pilotage, entre des Régions ouvertes à la discussion et prêtes à associer tous les partenaires, et d’autres où le développement de nos formations a été plus complexe pour ne pas dire freiné », observe Jean-Marc Petit, délégué général de Renasup.

A cette rentrée, un autre point d’attention doit particulièrement mobiliser l’Enseignement catholique dans sa relation avec les Régions : celui du champ culturel. « Nous devons renforcer nos liens avec les Conseils régionaux, qui financent de nombreuses actions dans ce domaine auxquelles nous n’avons pas toujours accès (ouverture sur la musique et les arts...) et réfléchir à d’autres sources de financement pour étoffer nos propositions en la matière », ajoute le délégué général de Renasup.

Inquiétude persistante sur les lycée pro

Reste la question douloureuse de l’apprentissage. Faute d’en avoir obtenu le pilotage, les Régions réclament une coordination pour l’élaboration de la carte des formations, condition « essentielle » pour que leur compétence sur la formation initiale en alternance soit respectée. « La loi ouvre à un total libéralisme et à une centralisation excessive en la matière », met en garde François Bonneau, qui redoute une concurrence exacerbée entre les lycées professionnels et les CFA existants avec les structures qui seront créées par les branches professionnelles. De quoi susciter de vifs débats en matière d’aménagement du territoire... Ce, d’autant plus que les 250M€ annoncés pour aider au maintien des petits CFA en zone rurale ne suffiront pas, prévient aussi l’ARF, qui a demandé le relèvement de ces crédits à 380M€, faute de quoi les Régions ne pourront plus soutenir les CFA...
Sur le financement des lycées professionnels enfin, l’incertitude plane encore. Dans l’attente des décrets d’application de la loi Pénicaud, Kamal Chibli indique que « la nouvelle répartition des ressources issues de la taxe professionnelle ne permettra pas d’assurer la totalité de ce qui existe aujourd’hui».

 

Le manifeste des Régions pour le lycée d'aujourd'hui et de demain

Ces préconisations des régions concernent l'esprit qui devra guider la création et l'entretien du parc immobilier des lycées. En adéquation avec les réformes en cours, l'ARF priorise les principes de bien-être, d'évolutivité, de sobriété, d'ouverture et de mutualisation

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Ne manquez pas les états généraux de l'enseignement professionnel dans l'enseignement catholique, le rendez-vous de 2018-2019 pour dialoguer et resserrer les liens avec les acteurs de la formation professionnelle.

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