« Pas que des bobos à l’école catho »

Un collège privé au chevet des quartiers sensibles du Mans

Le Figaro – Aude Bariéty
Publié le 17/10/21

REPORTAGE

Les contrats locaux d’accompagnement (CLA) ont été lancés à la rentrée scolaire de septembre 2021 dans trois académies: Lille, Nantes et Aix-Marseille pour réformer l'éducation prioritaire.

L'établissement catholique Saint-Benoît-Maupertuis, au Mans, dont près de la moitié des élèves sont boursiers, bénéficie de moyens supplémentaires dans le cadre d’une mesure test.

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«L'Enseignement catholique, ce ne sont pas que des familles bobos dans des établissements en pierre de taille!» Difficile de classer le groupe scolaire manceau Saint-Benoît-Maupertuis dans cette catégorie. 49,58 % de boursiers, 43 % d’élèves issus des quartiers est de la ville, considérés comme «sensibles», et 30 % d’élèves «en difficulté dans les apprentissages», selon une estimation de la direction: le collège Saint-Benoît fait face à des défis de taille. Après avoir réclamé de l’aide pendant des années, l’établissement a signé en ce début d’année scolaire un contrat local d’accompagnement (CLA) avec le rectorat de Nantes, dans le cadre d’une expérimentation menée dans trois académies. En tout, six établissements de l’enseignement catholique ont été sélectionnés. Fort de moyens financiers supplémentaires accordés pour trois ans, le directeur de Saint-Benoît, Jean-François Chauvin, salue «une bouffée d’oxygène» qui lui a permis de mettre en place plusieurs mesures très concrètes «dont (il) voit déjà les effets».

Première innovation: des séances hebdomadaires «coups de pouce» en français et mathématiques. En ce lundi, Stéphanie Hubert, professeur de lettres, anime une séance pour des élèves de sixième. «On est là parce que la dernière évaluation finale n’a pas été très réussie. L’objectif, c’est de comprendre vos erreurs pour ne pas les refaire, et d’avoir plus confiance en vous», lance la trentenaire à Yanis, Ilyès, Rihab, Camélia et Maïssa. Sérieux, concentrés, les cinq élèves répondent à chaque question du contrôle à l’aide de leur enseignante, qui insiste sur la méthodologie. «C’est bien d’être pas beaucoup, car la prof a le temps de nous expliquer», commente Yanis. «Pour se concentrer, c’est mieux qu’en classe, parce qu’il y a moins de bruit», abonde Camélia. Les professeurs sont enthousiastes. «La meilleure récompense, c’est quand les élèves nous disent qu’ils ont mieux compris», sourit Stéphanie Hubert. «On a l’impression d’être utiles, de donner une chance supplémentaire aux élèves», complète sa collègue Amel Aounti.

Saint-Benoît a aussi mis en place des temps d’aide aux devoirs le soir, une préparation au brevet pendant les vacances, des ateliers de confiance en soi animés par une kinésiologue, une formation aux premiers secours pour les troisièmes. Le directeur a embauché une personne à mi-temps, en renfort des équipes de vie scolaire. «Elle prend en charge des élèves exclus de cours pour des problèmes de comportement. Elle assure un suivi scolaire, les écoute, fait en sorte de les ramener rapidement vers leur classe pour éviter tout décrochage», explique Marie Giraud, responsable de la vie scolaire. L’établissement souhaite renforcer le lien avec les familles par le biais d’ateliers de parents le soir, avec une formation aux outils en ligne permettant de suivre les retards, absences, résultats des élèves. Un défi numérique et linguistique, de nombreux parents ne parlant pas français.

«Une attention à chaque jeune»

«Le lien avec les parents est essentiel. Ces familles, modestes dans leur grande majorité, souvent issues de l’immigration récente, nous confient leurs enfants avec l’espoir qu’on puisse leur donner des valeurs, les faire grandir, leur offrir un avenir meilleur. On essaie d’apporter une attention à chaque jeune», insiste le directeur, qui reçoit au moins une fois par an chacun des 250 élèves avec son professeur principal pour «faire le bilan». Christelle, mère d’un adolescent de 13 ans scolarisé en quatrième et qui cumule les difficultés, apprécie cet accompagnement. «J’ai décidé de mettre Maël à Saint-Benoît pour le cadre qu’offre l’établissement. Dans le public dont nous dépendons, je pense que je l’aurais perdu… L’avantage, c’est que c’est un petit collège. Les professeurs cherchent à connaître l’histoire de chaque élève, et je trouve ça très bien. Mon angoisse, c’était que Maël finisse par être renvoyé, mais toute l’équipe se bat pour lui, tout le monde veut l’aider à s’en sortir.»Séances «coups de pouce», aide aux devoirs, ateliers «confiance en soi», renfort en vie scolaire: le jeune garçon bénéficie de quatre des mesures mises en place dans le cadre du CLA. Autant de dispositifs qui seront évalués au cours de l’année.

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