Le Spelc se penche sur la question de l’autonomie

L’autonomie des établissements : quels enjeux pour la communauté de travail ? C’est le thème qui a réuni du 24 au 27 avril, les membres du Spelc, à Gérardmer, dans les Vosges, pour le 76e congrès de cette organisation professionnelle. La question a été analysée par des membres de l’OCDE et un expert des systèmes éducatifs le 25 avril et ne semble pas susciter d'opposition frontale chez les adhérents, à condition que cette autonomie s'accompagne d'une concertation renforcée au sein des établissements.

 

Près de 250 enseignants, chefs d’établissement, salariés de droit privé… étaient réunis du 24 au 27 avril dernier, à Gérardmer, la perle des Vosges, pour le congrès du Spelc. Thème de cette 76e édition : l’autonomie des établissements. Ce syndicat, composé majoritairement de maîtres, a en effet voulu faire bouger les lignes sur un sujet qui cristallise une certaine méfiance chez les enseignants.
Mercredi 25 avril, après avoir défini le terme d’autonomie comme « le transfert d’un pouvoir de décision du central vers le local », Corinne Heckmann et Fatine Guédira, analystes de l’éducation à l’OCDE, ont montré, enquête à l’appui, une corrélation positive entre les responsabilités en matière de gouvernance des établissements et la performance des élèves en sciences notamment. Après avoir évoqué les exemples d’autonomie à l’étranger, elles ont présenté les avantages et risques de l’autonomie. Parmi les avantages : une offre éducative plus large et donc plus adaptée aux besoins des élèves, plus de choix pour les parents, une plus grande capacité d'innovation, une meilleure collaboration entre acteurs…
Les risques sont aussi nombreux : creusement des inégalités, pression accrue sur les enseignants et chefs d’établissement, concurrence entre les établissements, perte du contrôle de la qualité de l’enseignement à défaut d’évaluation, budgets potentiellement mal gérés…
Pour une autonomie efficiente, les deux expertes recommandent donc de : développer une vision nationale claire, donner des moyens à toutes les écoles, former le chef d’établissement au leadership, impliquer davantage les parents et les enseignants dans la mise en place du projet d'établissement.
Bernard Hugonnier, professeur en sciences de l’éducation à l’ICP, s’est appliqué ensuite à mettre en perspective ces analyses. Pour lui, l’autonomie est inévitable. Tout concourt d’ailleurs dans notre société à nous y amener : une demande sociale pour une éducation de meilleure qualité, les responsabilités du CE se sont accrues, une plus grande efficacité est devenue un objectif permanent… Philosophiquement, « la tendance de l’humanité est aussi d’aller vers plus de liberté », a-t-il fait remarquer. Pour exemple : le principe à la mode d’empowerment, celui de la subsidiarité…
Pour réussir un passage à l’autonomie des établissements qui profite à l’État comme aux enseignants, il préconise des programmes mieux adaptés pour prévenir l’échec scolaire, et la nommination d'enseignants dont le profil correspond mieux au projet d’établissement.
Les participants se sont saisis de la question ensuite par petits groupes. « Si le Spelc n’a pas d’opposition de principe sur le sujet, il pose des conditions à sa réalisation, a résumé Luc Viehé. La première est que l’autonomie doit bien être celle de l’établissement et pas du chef d’établissement. Ce dernier doit être là pour donner des impulsions… Gare aux dérives autoritaristes ! La seconde c’est qu’un dialogue permanent entre les équipes pédagogique et éducative doit être établi avec une vigilance particulière pour les salariés de droit privé. La troisième c’est qu’il faut que les chefs d’établissement soient formés sur le plan RH. Le Spelc dénonce l’indigence de cette partie dans leur cursus de formation. Enfin, il faut revisiter le modèle économique de l’enseignement catholique. Il y a urgence à mettre en place des réseaux de solidarité entre les établissements très diversifiés de nos territoires. »
D’autres sujets d’actualité ont été abordés. Comme la réforme du lycée : « elle va dans le bon sens » pour le Spelc qui demande toutefois à être consulté car cela pourrait impacter le temps de service des enseignants. La réforme de la voie pro a également été discutée ainsi que la dernière directive du ministre de l’Éducation nationale sur la lecture et l’écriture, jugée « infantilisante » par l’organisation professionnelle.
Par ailleurs, Klaus Heeger, secrétaire général de la Confédération européenne des syndicats indépendants (Cesi), a présenté les défis européens pour les années à venir : accueil des migrants, égalité d’accès à l’éducation dans tous les pays d’Europe… Il a aussi encouragé à une collaboration européenne de tous les syndicats pour dessiner un espace européen de l’éducation.
Enfin, Luc Viehé a été élu président de la fédération. Jean-Yves Murgue en devient le secrétaire général.

Noémie Fossey-Sergent

Partagez cet article

>