Les défis des maternelles

Josiane Aguerre-Valencia est enseignante à l’école bilingue franco-basque Sainte-Marie-Eskola, dans une classe de maternelle multiniveaux - de la très petite à la grande section – sur les contreforts pyrénéens, à Ascain (64). Depuis le début du confinement, elle propose aux élèves et à leurs familles de réaliser quelques défis chaque semaine. Avec une envie : permettre à chacun d’exprimer toutes ses habiletés et créer d’autres liens.

Aurélie Sobocinski

« L’occasion de transformer ma pratique ». Enseignante, je m’ennuyais dans ma classe, comme beaucoup de collègues sûrement. Du jour au lendemain, avec cette situation de crise, je me suis retrouvée face à une nouvelle classe-maison, à distance de mes élèves. J’y ai vu l’occasion de réfléchir et mettre en place autre chose, de reconsidérer d’autres domaines que je n’incluais pas ou ne valorisais pas assez chez mes élèves - leurs intelligences musicale, corporelle, kinesthésique, visuelle spatiale, naturaliste. Comment l’intégrer tout en tenant compte du programme. Changer sans tout changer, voilà le défi !

 

« Je dois leur lancer des défis ! ». J’ai voulu proposer quelque chose avec un objectif commun, lié à mon projet de classe, qui mette en lumière chaque intelligence et crée une émulation tant chez moi que chez eux ! Le terme de « défi » s’est imposé, plus léger que celui de travail. Pour le réaliser, j’ai expliqué aux parents que j’avais besoin d’eux, sans que cela nécessite beaucoup de matériel : ce sont eux les tuteurs, moi je ne suis qu’une jardinière semant des graines qui ne peuvent germer sans leur aide.

 

« Rien d’obligatoire, juste le plaisir du lien. » J’envoie deux ou trois défis à chaque fois sans que cela soit tous les jours, en invitant les parents à m’envoyer des retours vidéos ou photos de leur enfant. A gauche, dans une première bulle, je présente la nature du défi - graphique, mathématique, pâte à modeler,… -  en expliquant la visée de la séance sans parler d’« objectif ». Au centre, est détaillée la mission du jour que le parent est invité à lire à son enfant. A droite, une autre bulle appelée « le coin parents » leur précise le matériel nécessaire, les gestes qui peuvent aider… Ce sont des défis très faciles que je puise pour la plupart sur le site de l’Ageem (association générale des enseignants des écoles et classes maternelles publique ; www.ageem.fr).

 

« Une expo pour horizon. » Pour l’instant je ne partage pas les retours des enfants et de leurs familles, mais je conserve tous ces éléments dans un dossier, avec l’idée de créer une grande expo qui fêtera nos retrouvailles à l’école et nous permettra de mettre en valeur ce que chacun aura réalisé - enfant et parent compris. Bien sûr j’ai le souci constant de certaines familles qui ne m’ont fait aucun retour jusqu’ici. Je réfléchis à une autre façon de les intégrer.

 

« Faire entrer la Vie en classe. » Parmi les domaines que je voudrais davantage développer en classe, il y a tout ce qui touche à l’exploration du monde, du vivant, de la matière, des objets, ainsi que les domaines artistique et physique. A notre retour à l’école, je voudrais transformer mon environnement de classe pour permettre des ateliers de jardinage, de cuisine, artistique… et réaménager aussi la cour de récréation - en les laissant patauger, manipuler des petits bouts de bois, de carton. Je voudrais aussi tenir compte davantage de mon environnement proche - la forêt, les parents avec leurs savoir-faire, leurs métiers… Faire entrer la vie en classe ! On a un programme à tenir mais aussi toutes ces compétences transversales et ces relations à inclure, c’est très important ! Cette période nous transforme tous et je sens déjà qu’à la « rentrée », avec les parents, nous travaillerons ensemble d’une autre façon.

 

Retrouvez les Carnets de Covid de Josiane en intégralité sur le site du Laboratoire des initiatives

 

Pourquoi ces défis?

  • Ils permettent le lien dans la famille,
  • ils peuvent être relevés ou pas,
  • ils donnent du dynamisme à l’apprentissage,
  • ils révèlent des habilités, des aptitudes pas forcément travaillés en classe,
  • ils se présentent sous une autre forme. L’objectif à gauche donné et matérialisé par une bulle rose, l’enseignant jardinier. A droite, le parent-tuteur qui prend le relais à la maison et annonce le défi dans une autre bulle jaune. Son rôle est affiné sur le côté. Et au centre l’enfant qui doit écouter le défi et le réaliser.
  • Ils permettent d’atténuer le fossé entre les élèves.
  • ils tiennent compte du programme défini et exigé, mais sont puisées dans des domaines que j’exploitais trop peu en classe (explorer le monde, logique, espace, temps, le vivant, la matière, les objets) (agir, s’exprimer, comprendre à travers l’activité physique, la motricité, la danse…) (et à travers les activités artistiques dessiner, réaliser, décorer, produire, écouter, rythmer, chanter…)

 

Comment ? Sous quelle forme ? Pour qui ? À quel rythme ?

Ces défis sont envoyés, par 3,  le dimanche soir et le mercredi à tous les élèves de ma classe TPS, PS, MS et GS. Afin de créer une cohésion de classe et pour ne pas les surcharger de mail.

Pour les élèves de GS, j’envoie le lundi 3 activités écrites pour la semaine, tenant compte de ma progression de la période et sur padlet, je leur propose des activités de manipulation préparant en amont la réalisation des fiches écrites. Ce travail est à conserver par les familles et à notre retour nous les collerons sur le cahier et nous remplirons notre cahier de progrès.

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