Chefs d’établissement : quels équilibres ?

Comment concilier mission et carrière ? Pénibilité et épanouissement ? C’est le questionnement sur le travail de chef d’établissement, proposé par la session 2018 de l’Addec, alliance des directeurs et directrices de l’enseignement chrétien. Une thématique plébiscitée par la centaine de participants qui se sont retrouvés, du 14 au 16 novembre 2018, à Rouen.

 

Couteau-suisse faisant rimer polyvalence, écoute et patience, animateur des communautés éducatives, artisan d’évangélisation mais aussi parfois cheville ouvrières de fusions délicates voire de liquidations judicaires plus complexes encore… Les échanges et témoignages qui ont nourri la session de l’Addec, qui s’est tenue du 14 au 16 novembre à Rouen, ont bien illustré la difficulté croissante à conjuguer posture professionnelle et service d’Eglise…
Entre apports théologiques formatifs et temps conviviaux, ce rendez-vous qui vise à soutenir les chefs d’établissement dans l’exercice de leur mission pastorale a ouvert plusieurs pistes en ce sens. « Des cas de chefs d’établissement interrompant leur mission ou aux prises avec de grandes difficultés étant remonté au conseil d’administration, nous avons souhaité interroger ce ressenti de pénibilité, à la fois avec une grande liberté de parole mais aussi en portant la réflexion sur le plan spirituel. Le père de La Tousche a notamment dressé un état des lieux très juste de l’accumulation parfois douloureuse des tâches et responsabilités avant d’insister sur l’indispensable fraternité qui permet d’atténuer le sentiment d’isolement des chefs d’établissement et donc d’alléger le poids de leur charge», détaille Pascal Leroy, directeur du collège Notre-Dame de La Bassée (59) et membre de l'Addec.

Ces saints du quotidien

Monseigneur Le Vert, évêque auxiliaire de Bordeaux et président de l’Addec s’est plus spécifiquement penché sur la tension entre mission et carrière : Au nom de la « synodalité missionnaire de l’Eglise » selon l’expression du pape François, il a présenté les chefs d’établissement comme « responsables et artisans de communion», et même comme des « saints du quotidien » qui œuvrent chaque jour à témoigner du Christ et donc à réaliser leur baptême.
Entre autres balises désignées pour guider cette mission, -à laquelle il est néanmoins permis de postuler- monseigneur Le Vert a indiqué l’impératif d’être mû par le désir de mieux évangéliser et de mieux servir et non par l’ambition ni le goût du pouvoir. Il a aussi suggéré de sanctifier la pénibilité du travail –en le reliant à la croix du Christ-, de s’attacher à rechercher des signes de sainteté chez les autres, de s’accorder des temps d’oraison, faisant valoir la fécondité de cette manière de travailler. Pour prévenir l’épuisement, il suggère d’alléger la culpabilité qu’il relie à une forme d’orgueil en rappelant que « personne n’est propriétaire de sa mission d’Église, puisque que c’est le Christ qui la réalise à travers nous ».

Le père de la Tousche, curé de Dieppe et adjoint au directeur diocésain, en se référant au récit du combat de Jacob et l’Amiral Coindreau, major général des Armées jusqu’en août 2018 ont tous deux évoqué la pugnacité requise par une mission qui place l’intérêt général et la notion de service en son centre.
Le discernement qui permet de mesurer comment l’exercice de la responsabilité ecclésiale approfondit la foi semble en être l’autre composante indispensable. C’est pourquoi l’École des cadres missionnés, qui accompagne la prise de responsabilité dans l’enseignement catholique, s’attache à « ouvrir dans ses formations des espaces de relecture spirituelle », a expliqué Nathalie Tretiakow, directrice de l’ECM. Le Séminaire « Dialogue et gouvernance » proposé par cette structure au printemps prochain ouvrira d'ailleurs un nouvel espace de réflexion aux chefs d’établissement engagés dans le réajustement permanent de « l’articulation du geste professionnel et du Croire ».

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