Mis à jour le : 20 novembre 2024 / Publié le : 20 novembre 2024
Des défis éducatifs à relever ensemble
Comment faire vivre la liberté scolaire, et ainsi le pluralisme et la diversité des établissements, facteurs de réussite individuelle et collective des élèves ? Comme chaque année, l’Enseignement catholique porte cette question au Salon des Maires, du 19 au 21 novembre.
L’École inclusive passe par la coopération
Cédric Vial, Sénateur de Savoie
Nathalie Trétiakow, adjointe au Secrétariat de l’Enseignement catholique
Stéphane Danjou, chef du collège du Sacré-Cœur, à Saint-Jouan-des-Guérets (35).
C’est un anniversaire qui amorce cette deuxième journée au Salon des maires 2024. Celui de la loi de 2005 sur le handicap, commentée en table-ronde par Cédric Vial, Sénateur de Savoie, Nathalie Trétiakow, adjointe au Secrétariat de l’Enseignement catholique et Stéphane Danjou, chef d’un établissement inclusif : le collège du Sacré-cœur à Saint-Jouan-des-Guérets (35). Le Sénateur de Savoie amorce cette table ronde-avec quelques chiffres : « le nombre d’enfants reconnus en situation de handicap a été presque multiplié par 4 depuis la promulgation de la loi, ce notamment grâce à une meilleure détection et une reconnaissance plus large des divers types de handicap ». Environ 500 000 enfants sont reconnus en situation de handicap aujourd’hui. Cette loi a donc été « un tournant majeur dans la conception et prise en compte du handicap, poursuit Cédric Vial, car elle a permis de consacrer deux choses : d’abord, l’idée que les personnes en situation de handicap doivent avoir les mêmes droits et garanties que l’ensemble des citoyens, ensuite la notion de compensation, physique et humaine. »
Le Sénateur le conçoit, cela prend du temps. Si l’accessibilité des bâtiments publics s’est grandement améliorée au cours des vingt dernières années, la compensation de tous les handicaps (sensoriel ou cognitif) est un objectif non-atteint. Stéphane Danjou renchérit : « l’accessibilité, ce n’est pas seulement une rampe d’accès ». Le Chef d’établissement, qui accueille en ses murs un Institut médico-éducatif, invite à mettre l’accent sur la formation de l’ensemble de la communauté éducative : « c’est l’étayage de l’adulte pour mieux comprendre ce qui fait obstacle à la compréhension de tous les élève, ordinaires et extraordinaires ».
Les enjeux restent majeurs en matière d’inclusivité scolaire, notamment en ce qui concerne l’accompagnement des élèves en situation de handicap assuré aujourd’hui par 150 000 personnel, le double d’il y a 10 ans. Alors que la loi du 27 mai 2024, sur une proposition du sénateur Vial, chargeait l’Etat de financer de l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap (AESH) durant le temps de pause méridienne dans les écoles et établissements scolaires publics et privés sous contrat, la circulaire de huit pages qui accompagne sa mise en œuvre complexifie l’application d’un texte pourtant très attendu. « On est très vigilant, déclare Nathalie Tretiakow, on veut compter sur la pérennité de cette loi car c’est une forme de justice et d’équité pour tous les enfants de France ».
A l’instar de Stéphane Danjou qui prône le rapprochement entre le secteur du médico-social et celui de l’éducation, pour Nathalie Trétiakow, l’inclusion doit également reposer sur la coopération : « On travaille tous ensemble, enseignants, AESH, personnels, mais on ne peut plus répondre aux besoins avec un seul corps de métier. Dans l’enseignement catholique, la démarche est prospective, il n’y a pas une consigne à appliquer : il faut proposer des expérimentations et partager les bonnes initiatives. »
Échanges de services
Alexandra Laridan, chef d’établissement du lycée Saint Roch d’Estaires.
Mme Dorothée BERTRAND, première adjointe au maire d’Estaires (59)
Sur la commune d’Estaires, à une vingtaine de kilomètres de l’agglomération lilloise, la municipalité et le lycée agricole privé Saint Roch ont toujours travaillé main dans la main. Un partenariat naturel où les échanges de services profitent aux jeunes et au territoire.
Le lycée qui scolarise quelque 160 élèves en bac pro SAPAT et dans ses classes de 3e et de 4e, le lycée propose un certificat d’aptitude professionnel en apprentissage qui accueille régulièrement les jeunes en contrat d’insertion à la mairie. Le centre d’apprentissage a également monté une formation sur mesure sur une année qui a permis à une dizaine de bénéficiaires du RSA d’obtenir le certificat d’aptitude professionnel, avec plusieurs embauches à la clé, au sein de services municipaux et à l’Epad communal. Cette structure, tout comme la crèche, la halte-garderie et les écoles publiques primaires offrent autant de lieux de stage et de terrains d’application aux élèves de Saint-Roch. Au sein même de leur établissement, des locaux ont été mis à disposition pour la création d’une maison d’assistante maternelle qui sert aussi de plateau technique aux élèves. « Aujourd’hui, des conventions de partenariat signées entre le lycée et chacune de ces structures, inscrivent sur la durée ces coopérations qui étaient auparavant plus ponctuelles car nos échanges structurent aujourd’hui vraiment la vie locale », se félicite Dorothée Bertrand première adjointe au maire d’Estaires.
« Les lycéens, qui viennent d’animer la semaine de la petite enfance à Estaires, enchaînent ainsi avec les propositions d’activités faites pour la semaine Azur qui met à l’honneur les seniors, à qui une enseignante de Saint-Roch propose déjà des ateliers cuisine réguliers tout au long de l’année », illustre Alexandra Larridan, la chef d’établissement.
Un prochain chantier, intergénérationnel devrait prochainement réunir ces acteurs autour de l’ancienne chapelle de l’Epad, récemment réhabilitée en lieu d’exposition et résidence d’artistes proposant des activités aux séniors. Nul doute que les apprenants d’Estaires graviteront aussi bientôt autour ce nouvel espace, qui pourrait aussi prochainement accueillir un foyer municipal pour les jeunes de la ville.
De Paris à marseille,
la mixité avance
Jean-François Canteneur, Directeur Diocésain de Paris
Jacques Le Loup, Directeur diocésain de Marseille
A Marseille comme à Paris, la mixité sociale et scolaire est un défi de taille. Jean-François Canteneur, Directeur Diocésain de Paris, l’avoue, « le constat est sans appel ». Si les différents indicateurs, dont l’indice de position sociale des familles (IPS), révèlent que les établissements du privé de la capitale accueillent principalement des familles socialement plus aisées, le Directeur Diocésain tient à nuancer : « l’IPS ne mesure pas seulement le capital financier des familles mais surtout leur capacité à aider la réussite de l’enfant. La richesse culturelle et l’investissement ne se joue pas juste à un bulletin de paie. A Paris, les IPS les plus élevés correspondent aux enfants d’enseignants ». A Marseille, la situation est plus contrastée, comme l’explique Jacques Le Loup, directeur diocésain : « Nous avons dans notre ville des établissements très fragiles et d’autres extrêmement favorisées. Sur l’échelle de l’IPS, les niveaux sont à la fois les plus faibles et les plus élevés du territoire français, avec très peu d’entre deux ».
Pour autant la question de la mixité, n’est pas aussi simple que ce que les critiques lancées contre l’enseignement catholiques tendent à faire croire. Déjà parce que la première question à se poser, selon Jean-François Canteneur est celle des attentes des familles : « quand on reprend les sondages de l’Apel, on réalise que ce qu’elles recherchent une homogénéité de fréquentations pour leurs enfants afin qu’ils évoluent dans des milieux qui ressemblent aux leurs. Ce alors que les lieux de brassage de cultures, de nationalités et de religions sont riches d’apprentissages.». Un travail est réalisé pour rendre l’enseignement catholique plus accessibles, en modulant les contributions selon les quotients familiaux, mais pour les deux Directeurs Diocésains l’aspect financier n’est pas l’unique facteur à prendre en compte. Jacques Leloup précise : « on a tendance à réduire la mixité à l’angle financier, or la question de la mixité est bien plus large. Il y a la question de l’éducation inclusive, la mixité sociale ou religieuse et d’autres leviers intéressants à explorer ».
Penser ensemble l’évolution du maillage scolaire
Stéphane Nouvel, directeur diocésain de la Vendée
François Remaud, chef d'établissement de l’école Notre-Dame, aux Essarts.
Guy Plissonneau, Président de l'association des maires de Vendée
À Challans, en Vendée, un équipement sportif, co-financé par la mairie et l’enseignement catholique pour profiter à tout le territoire vient tout juste d’être inauguré. Cet exemple de coopération fructueuse n'est pas isolé dans un territoire où l'enseignement catholique scolarise plus de la moitié de la population scolaire et est invité à chaque congrès local des maires: « Une trentaine de communes n’ont d’ailleurs qu’une seule école, de l’enseignement catholique, sur leur territoire. Nous sommes donc un acteur local incontournable, et l’AMF de Vendée est un partenaire de longue date », confirme le directeur diocésain Stéphane Nouvel. Dans le même esprit, François Remaud, qui dirige l’école Notre-Dame-des-Essarts participe avec l’ensemble des acteurs à l’élaboration du PEDT qui, cette année, a mis l’accent sur le sport santé et l’inclusion
« Bien sûr, dans un contexte budgétaire contraint, la négociation du forfait d’externat peut générer des tensions mais nous trouvons toujours des solutions en bonne intelligence » insiste Guy Plissonneau, Président de l'Association des maires de Vendée… Particularité locale, la Vendée est d’ailleurs relativement épargnée par le non versement de forfaits pour les élèves non-résidents qui grève le fonctionnement de nombreuses écoles rurales: « Chaque année, je sollicite les maires des élèves qui ne viennent pas de la commune de l’école et aucun ne m’a jamais fermé la porte », explique François Remaud.
Malgré ce climat favorable, Stéphane Nouvel s’inquiète de la baisse démographique qui menace le maillage de ses écoles, dont beaucoup comptent moins de quatre classes et sont donc très fragiles. Une préoccupation que partage Guy Plissonneau, Président de l'Association des maires de Vendée : « Pour une commune, la perte d’une école, c’est une petite mort, une forme de déclassement, une baisse d’attractivité pour les familles, les commerces qui, généralement, s’en vont dans la foulée… » L’évolution du maillage scolaire, pour anticiper et ne plus subir des obligations de fermeture sera un nouveau domaine de coopération pour les élus et l’enseignement catholique de Vendée.
Enseignante, espoir sportif et fierté du Tarn
Philippe Folliot, Sénateur du Tarn
Mélody Julien, enseignante stagiaire à Saint-Joseph, à Réalmont, et marathonienne.
Max Lesauvage, entraîneur sportif
En septembre 2024, les élèves de petite et moyenne section de l’école Saint-Joseph de Réalmont (81) ont vécu une rentrée avec une championne : Leur institutrice, Mélody Julien, revenait des Jeux Olympiques où elle a terminé 74ème à l’épreuve du marathon. Entre sport et études, pourquoi choisir ? « Ma grand-mère était institutrice dans le privé. Quand j’étais petite mon rêve était de devenir enseignante, ça n’a pas changé, j’ai réussi », explique très calmement la jeune femme. A cette vocation première, s’est ajouté il y a quelques années, en 2015, le goût pour l’athlétisme découvert grâce à l’entraineur qui a découvert son potentiel, Max Lesauvage, qui venait de créer un centre multisport.
Avec des résultats qui font la fierté du Sénateur, Philippe Folliot pour qui « cette jeune dame particulièrement sérieuse, accrocheuse, qui mène sa carrière avec beaucoup de pugnacité, incarne bien les valeurs de notre territoire ».
Mais même avec de la ténacité, conjuguer une vie de sportive à haut niveau et ses études d’enseignante n’est pas de tout repos. Mélody Julien ayant en prime décroché son concours au printemps dernier, elle démarre à Saint-Joseph sa dernière année de formation, en responsabilité de classe. La direction diocésaine du Tarn s’est démenée pour lui dénicher un poste berceau où ses horaires puissent être aménagés. Prochaine étape pour l’enseignante en février prochain: le marathon de Séville, qui lui permettrait de se qualifier pour le championnat de Tokyo. Un gros objectif, qu’elle conjuguera au plaisir d’enseigner à ses élèves, le goût d’apprendre, le vivre ensemble, et finalement le bien-être à l’école.
Défendre la liberté de choix des familles
Hélène Laubignat, Présidente de l’Apel
L’engagement d’Hélène Laubignat, présidente de l’Apel depuis juin dernier, a commencé par l’intérêt qu’elle portait au suivi de la scolarité de ses enfants. Et c’est l’une des missions de l’Apel que de faire reconnaître et d’aider chaque parent à remplir son rôle de premier éducateur de ses enfants.
Hélène Laubignat place son mandat sous le signe d’une proximité accrue avec les territoires et la défense de la liberté de choix de l’enseignement. « Nous souhaitons renvoyer la diversité des réalités que nous vivons dans les établissements pour éviter que tout l’Enseignement catholique ne soit amalgamé à quelques établissement surmédiatisés car caricaturaux : « Il n’est pas question de descendre dans la rue comme en 84, mais nous serons vigilants à préserver la liberté des familles de choisir leur système d’enseignement. Et cela passe par la défense du caractère propre qui fait que l’enseignement catholique offre une alternative réellement distincte de ce que propose l’enseignement public ».