Publié le : 23 octobre 2025
TikTok : l’algorithme qui rend addict
Le rapport parlementaire de septembre dernier, dit « TikTok », pointe très sévèrement ce réseau social qui promeut des contenus problématiques. Une menace pour la santé mentale des jeunes, principaux utilisateurs et victimes d’un algorithme pensé pour rendre addict.
«Une spirale de contenus néfastes». Le rapport parlementaire sur les effets psychologiques de TikTok sur les mineurs, paru le 11 septembre dernier, n’y va pas main morte pour qualifier le piège algorithmique dans lequel TikTok enferme ses utilisateurs, quasi exclusivement des jeunes. Si la firme chinoise se défend, mettant en avant ses nombreux modérateurs, ses filtres parentaux, et l’interdiction (peu respectée) d’ouvrir un compte avant l’âge de 13 ans, certaines dérives sont pourtant constatées : en cause, un algorithme implacable piloté par une IA nourrie de l’observation permanente des usagers et qui, sous couvert de maintenir une attention via des vidéos distrayantes, dérive progressivement vers des contenus promouvant le suicide et l’automutilation, les canons de beauté malsains, la désinformation médicale, les violences, les discriminations, le sexisme, la pédocriminalité… la liste est longue.
4 suicides d’ado en France
En France, onze familles ont déposé un recours collectif contre le réseau devant le tribunal de Créteil, pour défaut de modération, entretien du mal-être et incitation au suicide pour quatre adolescentes. «On interdit l’alcool aux jeunes, pourquoi ne rien faire, s’insurge Michel Demurget, chercheur à l’Inserm et auteur de La Fabrique du crétin digital. Aucun État n’autoriserait la commercialisation d’une voiture sans frein. Or les créateurs de plateformes, dont les algorithmes permettent de sélectionner les contenus qui font du buzz, donc du fric, ont bénéficié d’une impunité totale». Le chercheur fustige le manque de réponses concrètes des institutions, tout comme le rapport TikTok, qui a émis 43 recommandations : couvre-feu numérique de 22 h à 8 h pour les 15-18 ans, interdiction des réseaux au moins de 15 ans, généralisation du « Portable en pause » dans les lycées… Seront-elles appliquées ? Certaines peuvent l’être facilement, comme l’arrêt de l’application au bout d’une heure, d’autres seront plus longues à imposer, au vu des pratiques constatées. En attendant, éducateurs, parents et jeunes sont renvoyés à leurs responsabilités.
 
					 
					À lire prochainement dans ECmag #429
→ L’interview de Valérie-Anne Varette, enseignante documentaliste et représentante de l’association des profs-doc de Normandie, qui travaille avec les collégiens du collège Saint-Paul de Cherbourg (14) sur leurs usages parfois immodérés du smartphone.
→ Des outils, des ressources et des conseils d’experts pour aider les jeunes à bien grandir dans un monde où l’IA est désormais omniprésent.
« Un des pires réseaux sociaux à l’assaut de notre jeunesse », qualifie le rapport TikTok. Il s’est polarisé sur cette plateforme addictogène qui s’appuie essentiellement sur ce qui stimule le cerveau, à savoir le mouvement : les vidéos de danse y pullulent, générant un autre phénomène, celui du challenge, qui active les neurones miroirs poussant à imiter ce que l’on voit. Et quand on ajoute le biais cognitif qui nous fait aimer de plus en plus ce à quoi on est de plus en plus exposé, la boucle est bouclée. Les autres réseaux ne sont pourtant pas en reste : Instagram repose sur ses influenceurs en jouant sur les mécanismes de la comparaison sociale, l’algorithme de YouTube retient ses utilisateurs en leur proposant des vidéos de plus en plus trash, Snapchat mise sur le plaisir lié aux interactions sociales pour agréger ses communautés… Bref, les ingénieries de ces applis manipulent la mécanique de nos cerveaux -et surtout ses failles, en parfaite connaissance de cause. La diète ne sera pas facile…
