Mis à jour le : 22 septembre 2016 / Publié le : 22 juin 2016
Une réforme peu suivie mais féconde
Alors que 85 % des écoles de l’enseignement catholique ont choisi de ne pas adopter la réforme des rythmes scolaires, toutes ou presque travaillent une organisation de la journée plus juste pour chacun, comme en témoigne une récente enquête du département Éducation du Sgec présentée ici.
Une enquête qui permet de faire le point
« Si les écoles de l’enseignement catholique ont moins suivi que prévu la réforme ministérielle (15 % environ en 2014- 2015 soit 800 écoles et 13,5 % des élèves au total), en raison notamment des contraintes organisationnelles et financières, elles n’ont pas laissé cette réflexion essentielle et urgente en friche, bien au contraire. » Tel est le premier enseignement qui ressort de l’enquête sur "l’aménagement du temps de l’enfant à l’école maternelle, élémentaire et au collège", réalisée au printemps 2015 par le département Education du Secrétariat général de l’enseignement catholique (Sgec), et basée sur les réponses de plus de 400 établissements.
Une prise en compte des besoins des élèves
« La question des rythmes ne résume pas au passage aux 4,5 jours. Beaucoup d'établissements qui restent aux 4 jours mènent un vrai travail de sensibilisation, de concertation et d’expérimentation », observe Marie-Odile Plançon, responsable du pôle École au Sgec, à l’origine de cette enquête plus qualitative que quantitative. Seuls les établissements volontaires ont, en effet, répondu et de manière variable selon les régions (essentiellement la Bretagne, Aquitaine, Rhône-Alpes, Auvergne, Franche-Comté, Centre ainsi que les Yvelines).
Cette mise au travail se traduit par la volonté de repenser de façon pragmatique et contextualisée l’élaboration de la journée en s’appuyant sur une compréhension plus fine des besoins des élèves et de leurs familles et sur les apports de la chronobiologie. En Vendée, par exemple, un groupe de recherche-action formé par des enseignants et des chefs d'établissement volontaires est animé par les chargés de mission de la direction diocésaine avec le soutien d’une professionnelle.
L’accueil du matin : un moment à fort enjeu
Dans de nombreuses écoles maternelles, mais aussi primaires, l’accueil du matin a ainsi fait l’objet d’évolutions, avec la proposition notamment d’un accueil échelonné dans la classe pour favoriser le lien entre les familles et l’École, recevoir chacun et se mettre au travail en douceur. Dans certaines écoles, un en-cas est également proposé.
En vue d’une organisation du temps "plus fertile", une autre conception de la place des apprentissages est également mise en avant.
Des pauses essentielles
Des temps de pause mais aussi de réactivation ou de prise en compte des émotions ont été mis en place : « temps calme à chaque retour de récréation et après le repas », « bracelets d’humeur de différentes couleurs permettant de prendre en compte l’état émotionnel de chaque enfant dans la mise en œuvre des apprentissages »... « Ce qui frappe à travers cette réforme, c’est la réapparition du corps, le grand oublié de l’École, et la prise en compte de ses besoins », analyse Marie-Odile Plançon.
Une réflexion des équipes sur la question des récréations est souvent apparue « nécessaire pour tirer le meilleur parti de la nouvelle organisation ». « Désormais, les récréations peuvent se jouer dedans et dehors : on connaissait la différenciation dans la classe, désormais elle est aussi proposée sur les temps intermédiaires », ajoute la responsable du pôle École, signe à ses yeux « d’une grande flexibilité des équipes, attentives aux besoins différents des élèves. »
La parenthèse méridienne
La même logique vaut pour la pause méridienne, particulièrement lourde pour les enfants. Pour une meilleure récupération et plus de sérénité, les équipes ont repensé le passage à la cantine et le temps du repas. Des activités plus adaptées aux besoins du corps après le déjeuner ont été instaurées avec des « temps bulles » où les élèves peuvent se reposer, lire ou faire des activités calmement. Sans oublier la réhabilitation de la sieste organisée sur le temps périscolaire, tant pour les maternelles que pour les plus grands d‘élémentaire.
Bien utiliser les APC
Une vigilance particulière a été déployée dans de nombreuses équipes pour l’organisation des temps d’activités pédagogiques complémentaires (APC), souvent confondus depuis 2013 avec le temps péri-éducatif en raison de l’ouverture à des propositions de projets différents. Pour rester centrés sur ces temps d’aide, trois pistes ont été suivies : l’aide aux apprentissages et à l’anticipation des obstacles ; l’aide au travail personnel ; la remobilisation des élèves en déshérence en les engageant dans des projets d’école.
Le temps des enseignants
Indissociables de cette démarche pédagogique et didactique, les adultes ont aussi réfléchi à leur propre rapport au temps et à leur conception du métier. « Un peu houleuse mais essentielle, cette réflexion a renforcé le travail en équipe, même si les temps de concertation s’avèrent beaucoup plus difficiles à mettre en place suite à la réforme, et le sur-engagement des enseignants guette ».
Le collège aussi impliqué
Par effet domino, les lignes du temps ont bougé dans un certain nombre de collèges, en raison du fonctionnement fréquent des établissements par ensembles scolaires. Là aussi, « un plus grand équilibre est recherché dans l’organisation des journées, avec des temps-sas mais aussi des durées de cours aménagées de façon à sortir de l’effet zapping et de ce moule qui empêche de travailler ici à deux, là à plusieurs, et à gagner à la fois en flexibilité et en continuité », précise le rapport. « Globalement, la réflexion sur le temps scolaire apparaît vraiment comme l’occasion d’arrêter de juxtaposer des temps, et de redonner du sens, une cohérence aux temps d’apprentissage et de vie au sein de l’école », souligne le document.
Côté parents
Et les parents dans tout cela ? Si « un travail de réflexion commune autour des problématiques de vie (durée du temps de sommeil, alimentation du matin) reste encore à mener », selon Marie-Odile Plançon, la démarche de concertation et de réflexion engagée par les établissements a permis de les associer de façon intéressante, en les sensibilisant aux besoins des enfants et à la chronobiologie. Au final, observe-t-elle, « la réforme a réellement fonctionné – passage à 4,5 jours ou non - là où elle a été menée dans une approche environnementale respectueuse des rythmes de vie de chacun et du contexte des personnes de façon collégiale (enfants, parents, enseignants, personnels Ogec, responsables des collectivités) ». Et d’envisager la mise en œuvre des nouveaux programmes de maternelle, couplée à cette dynamique, comme l’occasion d’une École plus juste où se croisent respect de l’élève et apprentissages ambitieux pour la réussite de tous.
Retour à la semaine de 4 jours
Plusieurs écoles de l’enseignement catholique reviendront à la semaine de 4 jours à compter de la rentrée, précise l’enquête sur le temps de l’enfant à l’École réalisée par le département Education du Sgec, sans en communiquer toutefois le chiffre exact. Principale raison évoquée : la fatigue accrue pour les enfants, notamment en maternelle, alors que 96 % des écoles passées à une organisation sur neuf demi-journées ont opté pour le mercredi matin. De leur côté, les parents se plaignent très souvent d’un "non-ajustement" des nouveaux rythmes à celui de leur vie professionnelle et familiale. Les écoles où la mise en place se passe bien, « sont surtout celles pour lesquelles le travail s’est inscrit dans un partenariat aisé avec la mairie (liens étroits entre TAP et projet d’école, sorties pédagogiques proposées par la commune, respect de l’autonomie…). Cruciale, la question du financement et de la prise en charge de l’organisation des temps d’activité périscolaire semble loin d’être acquise et pourrait même accroître le retour aux 4 jours. Pour cette rentrée, en effet, l’enquête alerte sur « le désengagement de nombreuses communes faute de moyens pérennes et l’impossibilité de maintenir la gratuité de la prise en charge tant pour les enfants scolarisés dans le public que dans le privé ».