Mis à jour le : 28 mai 2025

La Journée du Sup ouvre de nouvelles perspectives

S’emparer des nouvelles problématiques de l’enseignement supérieur privé, imaginer des pistes d’avenir, tels étaient les objectifs de la Journée nationale du Sup, organisée par l’Enseignement catholique et RenaSup et au Beffroi de Montrouge (92) le 21 mai dernier. L’événement, qui a réuni près de 600 personnes : chefs d'établissement et adjoints du 2d degré chargé du supérieur, responsables de campus, directeurs diocésains, responsables institutionnels territoriaux, tutelles, Ogec… Au menu : des conférences pour éclairer, des forums pour débattre et une soixantaine de kiosques présentant des initiatives de terrain inspirantes !

Les interventions des jeunes filmés dans leurs établissements et proposées en ouverture de la Journée nationale du Sup, organisée par l’Enseignement catholique et RenaSup et le 21 mai dernier au Beffroi, à Montrouge (92) étaient éloquentes. Étudiant(e)s en classes préparatoires aux grandes écoles, en bachelors ou en masters et autres bacs +5 dans le cadre de l’apprentissage, toutes et tous ont le sentiment que l’avenir leur appartient. Une confiance liée à l’environnement aussi exigeant que rassurant du Sup de l’Enseignement catholique. « Ce reportage m’a réjoui car il montre que tous les chemins mènent à l’excellence et qu’il se vit quelque chose de particulier dans nos établissements », a observé Philippe Delorme, secrétaire général de l’Enseignement catholique lors de la plénière inaugurale. Et Yves Ruellan, président de RenaSup, de renchérir : « Dans un espace d’enseignement supérieur de plus en plus marqué par le secteur marchand l’Enseignement catholique a toute sa place, car il possède des valeurs fortes et accompagne les jeunes en devenir. » Impossible de démarrer une telle journée sans évoquer certaines « officines » qui, lorsqu’elles n'escroquent pas les jeunes et leurs familles sont toujours à la recherche de profits. « Nous ne sommes pas dans cette logique et c’est une force. Nous pouvons ainsi être pleinement associés aux travaux des ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur », a affirmé Philippe Delorme.

L’impact démographique

La plénière s’est poursuivie par l’intervention de Stéphane Le Bouler, Ancien Président par interim du HCERES (Haut conseil évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur) et chargé d’une mission de prospective sur l’emploi scientifique au ministère de l’Enseignement supérieur. Il a longuement insisté sur l’évolution de la démographie : « Les effectifs étudiants ont atteint un plafond et vont décroître à partir de 2033. À ce moment-là, la régulation entre les différentes filières va se poser de façon accrue. » Le prospectiviste constate déjà une désertion des jeunes des filières scientifiques. Difficile de savoir quel sera l’impact de la baisse démographique sur les territoires, dont l’attractivité est aujourd’hui très inégale, certains connaissant « une forme d’attrition ». Globalement, il est compliqué de prédire où iront les flux d’étudiants tant la dynamique d’orientation est « affaire de signaux en provenance des entreprises, de stratégies des acteurs du supérieur et… d’effets de mode ». Pour Stéphane Bouler, la meilleure façon de faire face à ces nombreuses incertitudes est de proposer une offre de formation de qualité…

Plus d’opportunités professionnelles

Rappeler aux jeunes que « le déficit démographique constitue pour eux une formidable ouverture » et que des opportunités professionnelles seront plus nombreuses, tel est le point de vue défendu par Olivier Faron, conseiller spécial éducation formation au Medef. Mais il s’est aussi montré inquiet sur la capacité du « système » à les accompagner dans leur orientation et leur insertion. « 17 % des jeunes sont des Neet (ni en études, ni en emploi, ni en formation). Ce n’est pas acceptable. Il faut accompagner ces jeunes au moment où ils sont en difficulté, c’est un enjeu fort ! », a-t-il insisté.

L’apprentissage c’est une « politique publique de la jeunesse qui marche, c’est un ascenseur social, et une voie qui devient noble », a-t-il ajouté. Revenir pour des raisons financières sur ce qui a été construit serait regrettable. D’autant que les entreprises sont déjà aujourd’hui fragilisées par un environnement économique rendu instable par la situation internationale.

Ces éclairages ont été complétés par les quatre débats forums consacrés aux jeunes face aux nouveaux métiers et ce que cela induit en matière de formation, à la contribution des pôles supérieurs au développement des territoires, aux différentes modalités possibles de formation au-delà du Contrat d’association, au positionnement des différentes composantes de l’enseignement supérieur catholique dans cet espace.

Deux déambulations autour d’une soixantaine de kiosques ont également permis aux participants de repérer des initiatives de terrain dans des domaines aussi variés que l’ouverture internationale, l’hybridation des formations, l’élaboration de stratégies de développement collectives allant jusqu’au montage de campus communs ainsi que les logiques partenariales à développer avec les Universités, les Instituts catholiques et les Grandes écoles de la Fesic… Des échanges nourris qui ont démontré toute l’énergie et la créativité mise au service des étudiants de l’Enseignement catholique et la richesse de ces rencontres, fruit d’un travail conjoint inauguré antre le Sgec et RenaSup lors de la rédaction du texte d’orientation sur la certification et la diplomation, comme l’a rappelé Nathalie Tretiakow, adjointe au secrétaire général de l’Enseignement catholique.

En guise de conclusion, cette dernière a évoqué le pape François :  « L’encyclique Fratelli tutti, nous invite à articuler le local, “qui nous fait marcher sur terre”, avec le global, “qui nous préserve de l’esprit de clocher”. À l’Enseignement catholique d’inventer les synergies nécessaires pour rendre compte à la fois de la richesse des territoires et de l’indispensable vision globale que nous avons à porter ensemble. Ce sont les conditions essentielles pour faire vivre et rayonner le réseau de l’Enseignement supérieur catholique ! »

Quatre débats ont jalonné la journée du 21 mai dernier
Leurs Replays seront à retrouver sur le site de renaSup, ici

FORUM / Les formations supérieures de demain face aux évolutions des jeunes, des technologies et du monde économique 

C’est Muriel Pénicaud, ancienne ministre du Travail, à l’origine de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel de 2018, qui a ouvert ce forum dédié au futur des formations supérieures. Un sujet dans lequel elle s’est récemment replongée pour co-écrire une BD qui enquête sur ce que signifiera « Travailler demain » après la révolution IA, en pleine transition écologique et dans un contexte d’incertitude internationale… « Je pensais l’intituler Le Tsunami du travail tant les bouleversements sont majeurs, mais les treize personnalités interrogées au fil des pages font émerger des pistes d’action plus convergentes qu’attendues qui m’ont rendue plus optimiste ! »

Durant ce forum, il a été longuement question d’orientation. « Je n’aime pas ce mot qui fait chef de gare… L’enjeu est plutôt d’aider les jeunes à s’orienter eux-mêmes en les exposant à la diversité des métiers en multipliant les rencontres et les témoignages », a exposé l’ancienne ministre. Gwarlann de Kerviller, professeur de marketing à l'IESEG, ne dit pas autre chose : « Il est essentiel d’élargir l’horizon des jeunes en leur présentant des filières méconnues et des parcours différents. » Pour René Siret, directeur général de l'École supérieure des agricultures (ESA), cela implique de mieux faire savoir qu’un ingénieur agronome peut par exemple exercer quelque 150 métiers différents, notamment en travaillant plus en proximité avec les enseignants du secondaire, voire du primaire. Olivier Gauvin, directeur adjoint de l’éducation et de la formation au Medef, veut quant à lui inciter les entreprises à prendre davantage part aux processus d’orientation, réclamant une concertation nationale sur ce sujet impliquant les partenaires sociaux et l’État.

FORUM / Lycées, Instituts catholiques, grandes écoles : concurrence, complémentarité, exclusivités, projets communs

Ce temps d’échange a permis aux responsables des quatre institutions majeures du Sup de l’Enseignement catholique – RenaSup, l’Udesca (Union des établissements d’enseignement supérieur catholique), la Fesic (Fédération des grandes écoles associatives d’intérêt collectif) et l’UNFL (Union des facultés libres) – de réaffirmer leur complémentarité. Les cinq universités catholiques sont, selon les termes de Patrick Macary, délégué général de l’Udesca, « dans une forme d’alliance et non de défiance » vis-à-vis des universités publiques, comme les trente grandes écoles regroupées dans la Fesic, les six instituts ralliés à la bannière de l’UNFL, comme l’a confirmé Éric Gherardi, président de l'Ices, Institut catholique de Vendée. Il s’agit en effet d’inventer ensemble des passerelles pour sécuriser les cursus des jeunes. Le tout en nous efforçant de répondre aux besoins spécifiques des territoires en diversifiant l’offre.

Avec un bémol émis par Philippe Choquet, président de la Fesic, sur les titres RNCP : « Ces titres sont trop professionnalisants à vision courte là où les diplômes permettent de développer des compétences plus transversales et donc plus durables… », a-t-il fait valoir. Ce à quoi Jean-Marc Petit a opposé que les titres RNCP restaient une option pertinente car « d’un accès plus simple et permettant de démocratiser les formations supérieures par l’apprentissage : leur forte professionnalisation n’empêche pas nos établissements de maintenir dans leurs cursus une dimension humaniste et le souci d’accroître l’esprit critique des étudiants, une composante fondamentale du Sup catholique qui leur permettra d’ailleurs, s’ils en ont le désir, d’aller plus loin. C’est peut-être là toute la différence avec les officines lucratives plus minimalistes pour des raisons de rentabilité ! »

Une raison de plus pour avancer ensemble sur la question de la qualité de la formation supérieure en développant – pourquoi pas ? – une identité et des valeurs communes. Un vaste champ de concertation en perspectives…

FORUM / Le développement du supérieur : du sous contrat au hors contrat payant en passant par l’apprentissage et la formation continue

Dynamisme et audace. C’est le crédo qui a permis au CFA Jean-Bosco, basé dans les Hauts-de-France, de profiter à plein du boom de l’apprentissage. En sept ans, ce CFA régional a ainsi triplé ses effectifs, qui atteignent aujourd’hui les 6 000 apprentis, tout en développant les niveaux bac+3 et au-delà, en partenariat avec La Catho de Lille et avec des certificateurs.

Son directeur, Jean-François Desbonnets a aussi misé sur la marque de l’Enseignement catholique qui rassure les entreprises dont il faut être plus proche pour les aider à répondre aux enjeux démographiques, écologiques et technologiques qu’elles rencontrent.

Même postulat pour Franck Levasseur, chef d'établissement de Jeanne-d'Arc, à Sainte-Adresse (76), dont le CFC, impacté négativement par loi Avenir en 2018 a dû rebondir : « Nous avons choisi de faire un investissement considérable et peu rentable à court terme pour moderniser le CFC en misant sur les besoins en formation continue induits par l’essor de l’IA et la transition écologique et auxquels l’Enseignement catholique a vocation à répondre. » Jean-Marie Chuepo, directeur de l’Institution Saint-Jean, à Douai (59), a quant à lui prouvé qu’il était possible de rendre service aux jeunes grâce au « hors contrat » et d’emprunter certaines techniques marketing sans sombrer dans un logique lucrative : « Même si mes formations sont payantes, je ne refuse aucune famille pour des raisons financières », a-t-il expliqué.

Profondément transformé depuis la loi de 2018, le modèle de l’apprentissage, qui accueille aujourd’hui un million de jeunes contre 300 000 avant la réforme est « défendu par le gouvernement malgré un budget contraint », a rassuré Stéphane Rémy, sous-directeur des politiques de formation et du contrôle au ministère du Travail. Pourtant, à partir de juillet prochain, les CFA – et non les Opco – devront facturer une contribution forfaitaire de 750 euros aux entreprises embauchant leurs apprentis préparant un diplôme ou une certification de niveau bac+3 à bac+5 et la prise en charge de l’apprentissage à distance sera minorée. « Il s’agit de trouver un juste équilibre entre les différents modèles de formation », a commenté Stéphane Rémy, qui a aussi assuré redoubler la lutte contre les organismes frauduleux.

FORUM / Le supérieur en tant qu'acteur d'un territoire dans ses composantes multiples

Évidemment, en matière de service aux territoires, l’enseignement agricole, qui s’est développé dans cette logique, est pionnier. Cet ancrage l’aide aujourd’hui à s’adapter à la triple évolution à laquelle il fait face : choc démographique avec la moitié des agriculteurs partant à la retraite dans la prochaine décennie, la transition écologique et une mutation de son public d’apprenants. Face à ces défis, la loi Avenir agricole a créé un nouveau bachelor : « À grade de licence, ce diplôme, décliné en neuf mentions conçues en concertation avec les professionnels, vise à améliorer l’attractivité des filières agricoles et inclut des modules transversaux sur les questions environnementales », a précisé Catherine Kerneur, adjointe au sous-directeur de l'Enseignement supérieur agricole. Une initiative saluée par Laurent Paillat, président de l'Anefa qui a rappelant la richesse des débouchés du secteur. Jean-Pierre Touzet, directeur du pôle Agriculture au Crédit agricole, a d’ailleurs mentionné un accord signé avec le ministère de l’Agriculture pour aider les nouveaux agriculteurs non issus du secteur, qui représentent aujourd’hui la moitié des installations accompagnées par le Crédit agricole.

Spécialisation à la médiation animale, conférence sur le consentement en fin de vie, ou sessions communes pour favoriser la coopération entre futurs urgentistes… le Campus Don Bosco de Lyon, adapte lui aussi sans cesse sa quinzaine de formations post-bac aux évolutions des métiers d’un secteur sanitaire et social également en tension. Depuis l’an dernier, il a même ouvert un Ifsi (Institut de formation en soins infirmiers), le seul de l’Enseignement catholique et le premier établissement en France à proposer de l’apprentissage dès la première année. « On monte nos formations en lien étroit avec les professionnels, mais aussi en tenant compte des aspirations de nos apprenants, âgés de 15 à 62 ans », a affirmé Jean-Michel Mari, le directeur du Campus.

Tenir ce double objectif est également le but de Terra Academia, école ouverte l’an dernier à Arras (62) et qui se veut « un accélérateur de transformation écologique au service des territoires », ce pourquoi « elle forme aussi bien des jeunes que des techniciens en emploi ou des chefs d’entreprise et des élus, pour intégrer la dimension environnementale aux métiers classiques », a détaillé Catherine Fabre, ancienne députée et directrice de son pôle technique et professionnel.

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