Mis à jour le : 23 juin 2025
Accélération des contrôles financiers et budgétaires
Depuis plusieurs mois, les contrôles .financiers et budgétaires des établissements de l'Enseignement catholique se multiplient. Ils sont réalisés par la direction générale des finances publiques. Inutile de paniquer car, généralement, ils se déroulent bien, mais mieux vaut s'y préparer.
Voici comment.

La ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, a promis que 1 000 contrôles d'établissements privés sous contrat seraient effectués en 2025. Des contrôles qui sont de deux natures, avec d'un côté le contrôle administratif effectué par le rectorat portant sur le contenu des enseignements, le respect des valeurs de la République, etc. (cf ECA n°426, p.22) et, de l'autre, le contrôle comptable et financier qui l'accompagne, effectué à la demande de la direction générale des finances publiques. Le premier pouvant déclencher l'autre. « Certains contrôles comptables et financiers sont réalisés indépendamment de tout contrôle administratif », précise Jean-Christophe Carrel, expert-comptable, administrateur de la Fédération nationale des Ogec, lors du webinaire organisé sur ce thème par la fédération le 22 mai dernier.
Certains contrôles comptables et financiers peuvent être inopinés. Cependant, quelques établissements sont prévenus en amont. Certaines directions diocésaines échangent même parfois sur les modalités d'organisation de ces audits avec la DDFIP (Direction départementale des finances publiques) ou la DRFIP (Direction régionale des finances publiques) qui les réalisent.
Pourquoi de tels contrôles?
Les établissements sous contrat bénéficiant de fonds publics provenant de l'État (rémunération des enseignants, forfaits d'externats) et des collectivités territoriales doivent rendre compte de leur gestion financière. « L'objectif, c'est de vérifier la traçabilité et la sécurisation des fonds publics ainsi que leur bonne utilisation », affirme Fanny Hamchin-Lebaillif, directrice du pôle expertise de gestion à la Fédération nationale des Ogec. Ainsi, le périmètre d'intervention des DDFIP/DRFIP comprend quatre grandes thématiques: l'établissement et son statut juridique, le financement public, sa traçabilité et sa sécurisation, la garantie de la gratuité de l'enseignement et enfin la rémunération des maîtres.
Faire preuve de pédagogie
Le contrôleur annonce en amont quelles personnes il souhaite rencontrer, chef d'établissement, responsable de la gestion et de l'économat, responsable des ressources humaines, etc. Côté Ogec, le président et le trésorier sont les principaux interlocuteurs des directions des finances publiques. « Les contrôleurs ne sont pas spécialisés et ne connaissent pas toujours très bien le fonctionnement de l'Enseignement catholique. Il faut être accueillant, faire preuve de pédagogie et expliquer les subtilités du secteur », souligne Jean-Christophe Carrel. Il est important d'informer l'ensemble des équipes de l'établissement du contrôle qui se déroule, sur
site ou à distance, pour une période pouvant aller jusqu'à trois mois.
Cinq étapes clés
Quel est le déroulé type d'un contrôle? La Fédération nationale des Ogec a déjà pu tirer les leçons des contrôles effectués au cours des derniers mois. Il comprend cinq grandes phases: l'envoi par les DDFIP/ DRFIP d'un courrier prévenant l'établissement du contrôle à venir, la réalisation de l'audit lui-même, avec de nombreuses rencontres et transferts de documents, l'envoi d'un rapport provisoire de la DDFIP/ DRFIP, qui ouvre une phase contradictoire accompagnée d'échanges avec l'établissement, puis la phase finale avec le rapport de contrôle définitif reçu par le président d'Ogec et le rectorat, accompagné de préconisations. Quelques mois plus tard, la direction des finances publiques s'assure que ces dernières ont bien été mises en œuvre.
Préparer les documents
Les directions des finances publiques demandent aux établissements de leur transmettre des documents. « Les trois pièces qu' il faut absolument avoir sous La main sont L'envoi des comptes de résultats de la gestion scolaire à la DDFIP, l'envoi aux familles des avenants financiers et pédagogiques précisant le mode de calcul des différentes contributions et enfin la publication des comptes » prévient Fanny Hamchin-Lebaillif Au-delà de ces documents« de base», des pièces seront demandées pour chacune des quatre thématiques contrôlées. Elles varient selon les DDFIP/DRFIP mais certaines choses peuvent être anticipées.
Par exemple, sur le chapitre fondamental du financement public et de sa sécurisation, il sera important d'être en mesure de fournir tous les documents relatifs à l'exécution des opérations budgétaires et financières (comptes de résultats, rapport du commissaire aux comptes), la présentation des dépenses (contrats, marchés, notes de frais), la liste des contrats, avenants, bulletins de paie, etc. des personnels non enseignants, la comptabilité analytique et les documents permettant de tracer l'utilisation des fonds publics et privés, et enfin le contrôle interne et l'organisation fonctionnelle avec présentation des procédures écrites, des délégations, de la chaîne de transmission des décisions, etc1.
Points forts vs points faibles
Avant le contrôle, iI est intéressant d'identifier les points forts de sa gestion financière et comptable et ceux sur lesquels on se sent moins à l'aise. « Parmi les points de fragilité souvent observés, on note un défaut de précision dans l'état des lieux et le respect des obligations réglementaires, des processus organisationnels rarement mis à jour et une comptabilité analytique qui ne permet pas clairement de tracer l'utilisation des fonds publics et privés », pointe Fanny Hamchin Lebaillif. Un exemple: les recettes des familles et les recettes publiques ne doivent pas être amalgamées et les charges liées au caractère propre doivent être distinguées des « autres » charges- ce qui est loin d'être toujours le cas. « Les auditeurs s'interrogent légitimement: Les familles paient-elles bien les charges liées au caractère propre de L' établissement? Sont-elles surfacturées ou sous-facturées? J'encourage les établissements à faire deux colonnes sur leur tableur dans Les comptes de la gestion scolaire: l'une pour les recettes publiques, l'autre pour les recettes des familles afin de préparer le tableau qui sera demandé » insiste Jean-Christophe Carrel. Si les recettes des familles sont excédentaires, il faut être en mesure de l'expliquer: est-ce parce que les recettes publiques sont insuffisantes? Est ce que des travaux d'investissement sont programmés afin de mettre aux normes l'établissement ou de maintenir on attractivité? Autant de question à anticiper.
Profiter du contrôle pour affiner ses process
Malgré leur caractère contraignant, il faut essayer de vivre les contrôles comme une opportunité permettant d'instiller davantage de rigueur. « Les contrôles permettent de questionner le respect des obligations juridiques qui incombent à une association, la structuration de ses procédures, son contrôle interne, la séparation des fonctions, les délégations de pouvoirs, la gestion des données numériques, la facturation électronique... Et de mieux anticiper ses investissements», assure Fanny Binot, membre de la commission d'expertise de gestion de la Fédération nationale des Ogec. Une rigueur que les DDFIP/DRFIP prennent très au sérieux puisqu'elles s'assurent, après un délai, que leurs préconisations sont bien suivies d'effets...
1. La Fédération nationale des Ogec a établi une note précisant pour chacune des thématiques les documents pouvant être demandés.