Le Grand Est, formé à la laïcité

La Lorraine a organisé une journée Laïcité le 29 novembre dernier, qui a réuni à Villers-lès-Nancy (54) une centaine de chefs d’établissement des quatre diocèses de la région. L’objectif de cette formation, ont rappelé Christian Vacelet, directeur diocésain de Metz, et Aurélie Stein, son homologue pour Saint-Dié et organisatrice de l’événement, est de reconduire cette sensibilisation dans les établissements de la région en expliquant aux personnels « la façon spécifique dont l’enseignement catholique vit cette laïcité ».« L’École catholique est-elle laïque ? s’est interrogé Pierre Marsollier, délégué général au Sgec, dans son intervention très appréciée des participants. C’est une gageure de définir la laïcité car la notion est polymorphe. » Elle s’articule autour de trois curseurs : libertés fondamentales, neutralité de l’État et unité nationale. Le délégué a proposé de « passer la laïcité au tamis de notre devise républicaine ». Premier constat : comme le dit la loi de 1905, « la République assure la liberté de conscience, elle garantit le libre exercice des cultes ». La laïcité n’est donc pas une privatisation du religieux. 

Deuxième point : neutralité de l’État ne doit pas rimer avec neutralisation des distinctions des individus dans la société. Gare à « la dérive égalitariste qui nous pousserait à regarder les personnes indistinctement ! ». Enfin, « la laïcité n’est pas une fi n mais bien un moyen au service de la liberté, de l’égalité et de la fraternité ». Or, il n’y a pas de dialogue fraternel et authentique « sans pouvoir dire qui on est et demander à l’autre qui il est, observe Pierre Marsollier. La laïcité n’est pas une fin mais bien un moyen au service de la liberté, de l’égalité et de la fraternité ». C’est au moyen même de son caractère propre que l’École catholique fera oeuvre de laïcité. 

Isabelle Jouault, juriste au Sgec, a ensuite rappelé les fondamentaux du droit. La laïcité garantit la liberté de conscience (celle de croire ou non) et de manifester ses convictions dans les limites du respect de l’ordre public. Elle impose la neutralité de l’État, de ses édifices et de ses agents publics, et laisse les usagers libres d’exprimer leur religion sous réserve, encore une fois, de ne pas faire de prosélytisme ni de troubler l’ordre public. 

Concernant l’École catholique, la loi de 2004, qui s’applique aux élèves des établissements publics, n’est pas opposable à ceux de l’enseignement catholique. « Ainsi, si un chef d’établissement veut interdire le port de la kippa, du turban ou du voile, il peut le faire seulement par le biais de son règlement intérieur. » Enfin, les enseignants du privé, tout agents publics qu’il soient, n’adoptent pas la neutralité de l’État : ils sont bien sûr tenus de respecter la liberté de conscience de leurs élèves, mais aussi le caractère propre de l’établissement, a minima en observant un devoir de réserve.L’après-midi a été l’occasion d’échanges entre participants sur des situations vécues, en lien avec la laïcité : un personnel Ogec s’absente pour une fête religieuse sans rattraper son jour d’absence ; une interne musulmane demande la mise à disposition d’une salle de prière… La journée s’est terminée par la présentation des deux nouveaux formateurs laïcité du Grand Est : Catherine Pellerin et Damien Grandjean. Ces deux chefs d’établissement proposent des sensibilisations d’une durée de six heures à tous les personnels, alliant apports théoriques, histoire de la laïcité en France et cas pratiques, avec l’objectif final que « tout le monde à l’issue de la session parle le même langage ».