La rentrée n’attend pas

Bien que démissionnaire, Nicole Belloubet, ministre de l’Éducation nationale a tenu, le 27 aout, une conférence de presse de rentrée marquée par une certaine liberté de ton. Elle a notamment évoqué le partenrait avec l’enseignement catholique au sujet des mixités, qu’elle a qualifié « d’essentiel ».

« Les sonneries des établissements ne sont fort heureusement pas calées sur celles du Palais Bourbon ! » Saluant l’investissement des personnels enseignants et de direction pour assurer la continuité de l’État dans un contexte d’incertitude politique, Nicole Belloubet, ministre de l’Éducation nationale démissionnaire a fait point sur la rentrée en conférence de presse, le 27 août. Elle a aussi souhaité à son successeur un budget supérieur à celui que laisse préjuger les plafonds de dépenses fixés par Matignon qui, en l’état, « ne répondent pas à l’intégralité des besoins de l’école ».

Alors que l’essentiel des mesures engagées suivent leurs cours, elle a déploré l’abandon de la réforme de la formation initiale des enseignants, souhaité plus d’autonomie pour les établissements, une coopération renforcée avec les collectivités locales.

Mixités

Réaffirmant son souhait que l’Ecole soit un « antidote à l’assignation sociale » Nicole Belloubet suggère la refonte de la carte de l’éducation prioritaire et la création d’un « service public d’aide aux devoirs» et le renforcement de la différenciation pédagogique. Elle encourage la pratique du sport et l’éducation culturelle comme leviers d’émancipation. Pour cela, les 30 mn d’activité physique et la SOP, semaine du sport, de l’olympisme et du paralympisme à l’école seront reconduits. Deux heures de sport supplémentaires sont aussi prévues dans les collèges REP et REP

L’essor de la pratique artistique -dont le théâtre au collège - et l’histoire des arts sont des priorités. Dès cette rentrée, il sera notamment possible de faire plus de sortie au théâtre grâce à la part collective du pass Culture et un plan national de formation sera proposé aux enseignants.

La ministre a rappelé enfin le travail partenarial engagé avec l’enseignement catholique via le protocole Mixités, qui entre en vigueur en cette rentrée, donnant de premiers résultats dont les « conséquences devront être évaluées ».

 « Tout proche » de l’objectif
des 100% de postes pourvus

Dans le 1er degré, toutes les académies, sauf celles de Créteil, Versailles, de Guyane, et de Mayotte ont pourvu l’intégralité des postes.  Dans le secondaire, malgré deux points d’augmentation du rendement des concours, certaines disciplines restent déficitaires. « Mais le recrutement anticipé de contractuels permettra de couvrir l’ensemble des besoins en enseignants », a rassuré la ministre. Concernant les remplacements de courte durée, le Pacte verra doubler les parts qui leur sont dédiées dans le second degré. L’an dernier, 2 millions d’heures de Pacte (sur un total de 7,6 millions) y avaient été consacrées avec 30% d’enseignants pactés. Les Stages de réussite dans le 1er degré devraient aussi augmenter tandis que, dans le 2nd degré, les enveloppes horaires allouées aux Devoirs faits et à École ouverte resteront stables.

Nouveaux programmes

En cycle 1 et 2, de la petite section au CE2, les programmes de français et mathématiques changent. Clarifiant et détaillant les attendus de chaque niveau d’enseignement, ils seront publiés « dès la fin des affaires courantes », pour entrer en vigueur à la rentrée 2025, laissant ainsi, une fois n’est pas coutume, du temps aux enseignants pour se les approprier et se former. Autre nouveauté au primaire : l’introduction d’évaluations nationales au CE2 et CM2, au service de la différenciation pédagogique.

Pour ce qui est de l’enseignement moral et civique (EMC), les nouveaux programmes de CP, CE2, 5e et 2de ont été publiés et les enseignants de peuvent s’en saisir dès à présent. Au cycle 4, ils s’enrichissent de 18 heures de projets d’éducation à la citoyenneté. Les programmes d’éducation affective relationnelle et sexuelle, « en cours de finalisation » pourront donc servir de base, dès cette année, aux trois séances d’éducation à la sexualité, programmées à date libre.

Au lycée, la continuité prévaudra avec « peut-être quelques allégements de programmes » et la reconduction des stages en entreprise de fin de 2de.

Nouveau collège

La ministre Nicole Belloubet a rappelé son attachement « au maintien jusqu’à 15 ans d’un socle commun de connaissances et de compétences » que les groupes de besoins qui se mettront en place à partir de septembre en français et en mathématiques en 6ème et 5ème ne viennent pas contredire. Mise en place avec « pragmatisme et souplesse », selon des modalités « déterminées par les équipes pédagogiques », cette nouvelle organisation vise à « réduire ponctuellement l’hétérogénéité des classes » et « à faire travailler ensemble les enseignants ». Par ailleurs, des heures supplémentaires de soutien seront proposées aux élèves rencontrant le plus de difficultés.

Les modalités de passage du brevet évoluent aussi. Le contrôle continu représentera dorénavant 40 % de la note finale (au lieu de 50 %) et prendra en compte toutes les disciplines, sans coefficient. Les textes sont prêts. Dès qu’un gouvernement sera nommé, le prochain CSE sera saisi de ce texte qui pourra ainsi être mis en œuvre.

En revanche, le décret conditionnant l’entrée au lycée à l’obtention du brevet, initialement prévu par le "choc des savoirs" est "gelé" et son avenir tout à fait incertain… Les classes Prépa seconde, que 1000 élèves volontaires ayant échoué au DNB expérimentent cette année, seront néanmoins évaluées, sur leur capacité à prévenir le décrochage.

 

Pause numérique

L’interdiction des téléphones portables dans les écoles et collèges devrait être effective dès janvier 2025. Elle se fera en partenariat avec les collectivités territoriales qui financeront les casiers à portables. Cette pause sera expérimentée par 200 collèges dès la rentrée. Il ne s’agit pas pour autant d’empêcher le développement de la pédagogie numérique. Une feuille de route en matière d’IA sera également définie.

Pour une école plus inclusive

Avec plus de 490 000 élèves en situation de handicap à la rentrée 2024, -dont 24 000 en attente place en IME-, Nicole Belloubet estime que l’école respecte ses engagements inclusifs mais « a besoin d’un appui effectif et renforcé » pour le faire dans de meilleures conditions.

L’accompagnement humain de ces élèves sera donc porté à 88 500 postes (+ 3000 ETP) et un plan métier sera déployé pour ces AESH qui représentent un total de 132 000 personnels. Près de 11 000 unités localisées pour l’inclusion scolaire s’ouvrent aussi dans le 1er et le 2nd degré. Enfin, dans l’Aisne, l’Eure-et-Loir, la Côte-d’Or et le Var, une centaine de pôles d’appui à la scolarité seront expérimentés cette année. L’expertise coordonnée de personnels de l’éducation nationale et du médico-sociale y sera mise au service de l’accueil des familles, du suivi des jeunes et du soutien des enseignants. Ils gèreront aussi localement les AESH et mettront en œuvre certains aménagements pédagogiques sans attendre de notification de MDPH.

A terme, ces Pas pourraient remplacer l’ensemble des Pial actuels pour un accompagnement plus souple et plus proches des élèves en situation de handicap. A noter enfin que cette année, l’ensemble des élèves (y compris ceux relevant du service médico-social ou de l’administration pénitentiaire) auront un identifiant national de manière à pouvoir ouvrir un livret de parcours inclusif (LPI). Aujourd’hui plus de 308 568 LPI consignent l’historique des adaptations scolaires de manière à faciliter le suivi des élèves à besoin éducatif particuliers.

Un sanctuaire républicain

Conformément au plan ministériel d’avril 2024, un panel de mesures vise à améliorer la sécurité, le climat scolaire et le bien-être dans les établissements. Ainsi, en cette rentrée 2024, une force mobile scolaire, composée de 20 agents, pourra intervenir en renfort des 500 membres des équipes mobiles de sécurité académiques, partout sur le territoire métropolitain, dans un délai de 24 à 48 heures. Nicole Belloubet a aussi promis « la fin réelle du pas de vague » avec le soutien et la protection fonctionnelle pour tous les personnels victimes de menaces et la tolérance 0 en matière d’atteintes à la laïcité et de discriminations. Une vigilance renforcée s’exercera par ailleurs autour des établissements confessionnels juifs, suite à l’attaque terroriste de la synagogue de la Grande Motte cet été. Enfin, l’accent mis l’an dernier sur la prévention du harcèlement se poursuivra également.

 

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